Contrôle des chômeurs ou seuils sociaux, le ministre du Travail ne fait pas dans la demi-mesure. Son franc-parler détonne. Et son approche des dossiers étonne. Portrait d’un vrai politique.
La douche froide… Il a beau avoir de l’humour, François Rebsamen n’a guère goûté d’être aspergé d’eau par une trentaine d’intermittents et de précaires lors d’un salon pour l’emploi à Paris, fin septembre. Quelques mois plus tôt, les mêmes avaient pendu sa marionnette à une corde pour avoir agréé la convention Unedic modifiant leurs règles d’indemnisation. Dur d’être ministre du Travail quand le pays compte 5 millions de chômeurs et une croissance collée à 0,4 %.
Lassé d’entendre les quolibets de la droite scander «ministre du chômage» quand il répond aux questions au gouvernement, le locataire de la Rue de Grenelle a d’ailleurs prié Claude Bartolone, le président de l’Assemblée nationale, de le présenter juste comme «Monsieur le ministre François Rebsamen». Le Travail, c’est du sport. Et l’ancien lieutenant de François Hollande est en train de le mesurer.
Ah ! les chiffres du chômage
Quand, début avril, le président de la République lui propose de récupérer le fauteuil de Michel Sapin, il promet de mettre ses pas dans ceux de son prédécesseur. La continuité… mais dans la rupture. Fidèles au hollandisme, les deux hommes partagent cette conviction que le dialogue social est la marque du quinquennat.
L’équipe, pilotée par Pierre-André Imbert, est peu ou prou la même. Mais quand l’un pouvait manier la langue de bois et afficher un surprenant optimisme, l’autre met les pieds dans le plat. «Rebs» n’a pas sa langue dans sa poche et aime «secouer les branches», comme il l’avoue lui-même. Michel Sapin ne lui a pas seulement laissé Titi, le poisson rouge, en héritage.
Mais aussi les chiffres du chômage, que ce fort en gueule refuse tout net de commenter quand son prédécesseur s’y prêtait scrupuleusement. «C’était une erreur ! Quand vous annoncez pour la cinquième fois une hausse, c’est une catastrophe, médiatiquement !» pense-t-il. Chaque 26 du mois, ce socialiste – qui en a pourtant vu d’autres – stresse. «Il faut remettre de la sérénité dans ces chiffres. Il n’y a que les tendances trimestrielles qui sont signifiantes. Au sens du BIT, notre taux de chômage atteint 9,7 %», relativise-t-il.
Son ambition ? «Ne pas avoir atteint les 10 % de chômage au sens du BIT à la fin de l’année.» Son horizon est court. Et modeste. Mais ce pragmatique déteste les fausses promesses et sait qu’elles ont déjà coûté cher à la gauche. «Il n’est pas concevable qu’à un moment donné les entreprises ne se saisissent pas de tout ce que l’on a fait. Mais jusqu’à présent, c’est un échec», se désole-t-il.