logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Un CE de la SNCF alerte sur la sécurité des voyageurs

Entreprise & Carrières | Condition de travail | publié le : 04.09.2015 | Guillaume Le Nagard

Image

Le CE régional Nord-Pas-de-Calais a commandé une expertise sur les conditions et la qualité du travail après la réforme ferroviaire. En cause : la sécurité des voyageurs. Une thèse inquiétante, illustrée dans Vérités et mensonges sur la SNCF, un documentaire diffusé en parrallèle.

Vérités et mensonges sur la SNCF “ : à peine deux ans après l’accident meurtrier de Bretigny-sur-Orge et quelques semaines après la mise en oeuvre effective de la réforme ferroviaire, le documentaire d’une heure commandé au journaliste Gilles Balbastre par le comité d’établissement régional Nord Pas de Calais du groupe public ferroviaire, va faire grincer des dents du côté de la direction. Il est diffusé sur Youtube depuis le 3 septembre.

Le film explore les effets de la loi de 2014 qui créé trois entités - un Epic de tête SNCF et deux “société filles“ SNCF Mobilités et SNCF Réseau - sur les conditions de travail des agents et la qualité de leur travail. Thèse du document : une séparation des entités - déjà effective depuis la création de RFF par la loi de 1997, aurait pour conséquences des risques sur la sécurité des voyageurs. Le réalisateur interroge des élus, mais suit aussi des agents, dont le visage est flouté, sur les voies pour constater avec eux la dégradation du matériel -tire-fonds cassés, rails fendus- ou encore dans les ateliers où les révisions de matériel sont séquencées pour optimiser une remise en circulation la plus rapide possible. Un conducteur de train explique de son côté que lui-même et ses collègues doivent rouler à moins de 60 km sur certaines portions des voies en raison de leur état d’usure.

Communication choc Alors que les tensions montent autour des élections professionnelles du nouveau groupe, le CER Nord Pas de Calais, majoritairement CGT et Unsa, a donc opté pour une communication choc afin d’alerter à la fois la direction et le public. Cette région est la deuxième après l’Ile-de-France pour la fréquentation des TER. Depuis le 1er juillet dernier, 2888 agents travaillent pour SNCF Réseau et 4885 pour SNCF Mobilités.

Le documentaire accompagne une expertise libre réalisée par le cabinet Emergences, proche de la CGT, qui intervient régulièrement à la demande des CE et CHSCT. «Nous avons demandé à plusieurs reprises des expertises sur les conséquences de la réforme, explique Hervé Gomet, président de la commission économique du CER. Elles nous ont jusqu’ici été refusées par la direction, y compris en justice. Nous avons donc décidé de financer cette enquête et le documentaire sur nos fonds.» Elle a été présentée le 27 août en séance extraordinaire du CER.

Les consultants d’Emergences détaillent les difficultés issues de la séparation des entreprises depuis 1997 et qu’intensifiera, selon eux, la création des trois Epic, pourtant présentée par les pouvoirs publics et la direction comme une réunification de la SNCF : multiplication des prescriptions avec de nouvelles instances de contrôle, préjudiciables à la charge de travail et à la qualité du travail; pilotage de l’activité et transmission des informations rendus plus complexes, risque de difficultés accrues de dialogue entre les strates hiérarchiques et entre les métiers. Et de pointer les conséquences à craindre de ces évolutions sur la sécurité des transports.

Tâches chronométrées Ainsi, la modularisation de la maintenance, exemple retenu par les auteurs, a été engagée sur le site de Calais en fin 2011, l’un des premiers de ce programme national. Les tâches ont été chronométrées et une cinquantaine de modules de 6 heures correspondant à une série d’interventions ont été définis. Une organisation qui nuit à la qualité du travail, selon les entretiens menés à Calais par le cabinet.

«Quelles mesures sont envisagées pour donner davantage de sens au travail préventif dans l’entreprise, cesser de faire primer la prévention des conflits sur la prévention des risques professionnels, et favoriser une approche globale des dangers, en rapprochant la sécurité du personnel et la sécurité des circulations?», interroge le rapport en conclusion.

A quelques semaines du scrutin, les visées électorales de ses commanditaires -la CGT et l’Unsa s’opposent à la direction et aux syndicats réformistes sur les règles de représentation des salariés - ne peuvent être ignorées. Les dysfonctionnements relevés dans l’expertise et illustrés par le documentaire ont tout de même de quoi inquiéter. La direction de la SNCF, jusqu’ici, n’a pas répondu à nos sollicitations.

Auteur

  • Guillaume Le Nagard

ma pub ici