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Sephora face à la tuberculose dans un magasin parisien

Liaisons Sociales Magazine | Condition de travail | publié le : 19.11.2014 | Anne Fairise

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Deux salariés du magasin Sephora de la gare Saint-Lazare, à Paris, ont contracté la tuberculose et quatre autres ont été infectés. Un dossier sensible pour la direction de l'enseigne, qui a tardé à prendre les mesures adéquates.

Le spécialiste du parfum Sephora a-t-il pris toutes les mesures nécessaires pour empêcher la transmission de la tuberculose parmi les vendeurs du magasin de la gare Saint-Lazare, à Paris ? La question taraude son personnel, à mesure que le bilan des employés malades ou infectés (sans être contagieux ni devenir malades) s’alourdit. Selon nos informations, depuis la déclaration du premier cas de tuberculose par l’entreprise à la médecine du travail, le 12 février dernier, un second salarié a développé cette maladie et quatre autres se sont révélés infectés. 

C’est beaucoup. « En région parisienne, un cas de tuberculose par entreprise est considéré comme quelque chose d’anodin, au regard du nombre total de personnes souffrant de cette maladie en Ile-de-France », nous expliquait en septembre le docteur Fadi Antoun, référent scientifique du Centre de lutte antituberculeuse (CLAT) de Paris. L’organisme départemental est chargé du dépistage et de la prise en charge de la maladie infectieuse contagieuse, dans le cadre du programme national de lutte mis en place depuis 2004.

Dépistages tardifs

Surtout, les salariés se demandent pourquoi il a fallu attendre le mois de septembre – sept mois après la déclaration du premier cas !- pour que la médecine du travail cherche à établir, auprès de l’ensemble du personnel de la boutique, qui a été en contact étroit avec le  malade.

C’est pourtant une recommandation du Conseil supérieur d’hygiène publique: dès qu’une contagiosité est suspectée, le médecin du travail, en lien avec le CLAT départemental, doit recenser précisément les personnes ayant fréquenté de très près le salarié malade afin de pouvoir les soumettre à d’éventuels dépistages. Au Sephora Saint-Lazare, cette enquête élargie n’aura été lancée qu’à la rentrée.

La direction de l’enseigne en a informé le 17 septembre tous les salariés, après avoir levé le mystère sur les raisons de l’absence pour maladie, au printemps, de deux cadres : le premier a été déclaré malade de la tuberculose en février ; le second a été déclaré infecté en avril. Une communication opportune. Car ce mystère avait déjà été très largement éventé par la rumeur.

Au point que le CHSCT de Sephora avait convoqué, ce même 17 septembre, une réunion extraordinaire pour faire la lumière sur l’affaire. Et que les cheminots membres du CHSCT de la gare s’étaient déplacés les jours précédents dans le magasin... Paniqués, certains salariés s’étaient même retournés vers leur médecin traitant pour pouvoir être dépistés. Des examens engagés à leurs frais.

CHSCT tenu à l’écart

Cette seconde enquête, tardive et élargie à tout le personnel, pointe en creux les insuffisances de la première étude menée au printemps par le médecin du travail, en liaison avec le CLAT 75, pour déterminer les risques de contagion. A l'issue de celle-ci, une seule personne avait été dépistée, et s’était révélée infectée…

Mais même cette seconde enquête, qui a conduit au dépistage de dix nouveaux salariés et a révélé un second malade, est incomplète selon Djilla Delahaye Yelmani, représentante SUD au CHSCT de Sephora. « Tous les salariés n’ont pas été avertis. Je pense à une vendeuse, mutée en mars dans le sud de la France, qui a quitté depuis l’entreprise. Elle ignorait qu’une enquête était ouverte. Je le lui ai appris. Elle est enceinte. ».

Autre bug, le CHSCT n’a jamais été averti par la direction de la présence d'un salarié malade de la tuberculose ni des démarches engagées. Et ce, malgré la tenue de quatre réunions postérieures au signalement à la médecine du travail... « Cela fait beaucoup de dysfonctionnements et de négligences. Sephora a failli à son devoir de protection de la santé de ses salariés, et à son devoir d’information », estime le syndicat SUD. L’enseigne refuse de s’exprimer au nom de la « préservation du secret médical ». Le CLAT 75, qui avait répondu à nos questions en septembre, s’y refuse également aujourd’hui. 

Auteur

  • Anne Fairise

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