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Forfait jours : ce qui coince encore.

Entreprise & Carrières | Condition de travail | publié le : 05.07.2017 | Marie-Madeleine Sève

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Cette formule atypique du temps de travail est régulée depuis des années par la jurisprudence. La loi Travail sécurise les dispositifs. Mais le contrôle et la mesure de la charge de travail restent un nœud gordien. Les DRH ont intérêt à veiller à leur effectivité.

Le 14 décembre 2016, tombait un arrêt de la Cour de cassation, déclarant « nulle », la clause de forfait en jours d’un salarié du cabinet immobilier breton Bras, licencié en 2009. Et ce, au motif qu’il n’avait pas eu l’entretien annuel pour faire le point sur sa charge de travail des douze derniers mois. La Haute juridiction a, de surcroît, estimé que la convention de branche n’était « pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assure une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé ».

Résultat : le cabinet a été condamné à verser au plaignant 47 100 euros au titre des heures supplémentaires, 13 000 euros au titre des repos compensateurs et 6 000 euros au titre des congés afférents à ces deux cas de figure. Soit 66 000 euros au total.

Droit à la santé. Une note salée, qui est loin d’être exceptionnelle. Et qui risque de faire tache d’huile dans un secteur qui compte beaucoup de TPE, à l’assise financière parfois friable. La juridiction suprême a déjà annulé plusieurs accords de ce type s’inspirant de son arrêt en date du 29 juin 2011, qui énonçait les conditions de validité de ce régime atypique. Se fondant sur le droit à la santé et au repos, les juges ont imposé le respect des durées maximales de travail, ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires, reprenant en cela les résolutions du droit européen.

Une fois l’accord de branche cassé et annulé, par ricochet les forfaits individuels en découlant sont nuls, le bénéficiaire pouvant solliciter des rappels de salaire pour les heures effectuées au-delà des 35 heures légales. Une insécurité juridique majeure pour les entreprises ! D’autant plus que deux syndicats tenaces, la CFE-CGC et l’Ugict-CGT, ont saisi pour la 4e fois depuis 2001, la Conseil de l’Europe (lire p. 20), en remettant en cause les lois françaises.

« Ces coups de boutoir successifs ont fragilisé le forfait jours, observe Sylvain Niel, avocat associé au cabinet Fidal. Les gouvernements, quelle que soit leur approche, ont essayé de recoudre, de reconsolider le dispositif en rajoutant des contraintes. Ce qui affole les entreprises ». Les contentieux sur le sujet auprès de la Cour de cassation, même s’ils ne pèsent que 6 % de son activité, ont augmenté de 75 % en deux ans, passant de 48 arrêts en 2014, à 84 en 2016.

Loi Travail. La loi El Khomri, du 8 août 2016, lève cette chape de plomb. Elle introduit, trois conditions de santé-sécurité rendant licites les nouveaux accords conclus : 1/les modalités d’évaluation et de suivi régulier de la charge de travail ; 2/les modalités de communication périodique employeur/salarié ; 3/les modalités du droit à la déconnexion. Ce qui intéressera les 280 branches (sur 750) qui ne se sont pas encore penchées sur la question. Et quid des accords antérieurs dépourvus de ces dispositions ? « La loi prévoit un cadre supplétif qui les sécurise, explique Déborah David, avocate associée au cabinet Jeantet. Autrement dit l’employeur peut combler unilatéralement les carences de l’accord collectif, ce que la jurisprudence n’admet pas. » À charge pour lui, d’établir un document de contrôle du nombre de jours travaillés ; de s’assurer que

 

Auteur

  • Marie-Madeleine Sève

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